Analyse de la décision de la Cour d’Appel d’Aix en Provence, 14 mai 2020, n°17/21636 Bulletin des Transports et de la Logistique n°3786 du 25 mai 2020
L’important de la différenciation entre la suspension du délai et l’interruption réside dans leurs effets : l’interruption de la prescription efface le délai acquis jusqu’à lors et fait courir un nouveau délai de même durée que l’ancien.
Alors qu’à l’inverse, la suspension du délai de prescription n’efface pas le délai ancien, il arrête le cours du délai puis le fait reprendre à la fin de la cause de la suspension.
Cependant, parfois, une interruption du délai et une suspension de celui-ci s’entremêlent dans une même affaire, si bien que même les juges ont quelques fois du mal à distinguer les deux.
L’arrêt d’espèce concerne un particulier qui, afin de réaliser des travaux dans sa maison, pris la décision d’entreposer ses meubles dans un garde meubles. Le déménagement de ces meubles est achevé le 14 janvier 2013 par le déménageur. Cependant, un vol sur l’aire d’entreposage conduit le requérant à déplacer le reste de ses meubles dans un autre garde meubles, lesquels sont en parti endommagés durant le transport, avant qu’un dégât des eaux ne survienne dans le second garde meubles les endommageant d’autant plus.
Le 28 juillet 2013, le propriétaire instruit une demande en référé expertise.
Le 29 octobre 2013 l’ordonnance subséquente est rendue, et l’expert dépose son rapport le 30 juin 2015.
Le requérant et Assureurs sont assignés au fond en avril 2016.
Le jugement déclare alors l’action prescrite au regard du délai d’un an prévu par l’article L133-6 du code de commerce.
La CA casse l’arrêt de première instance en revenant sur le calcul et la qualification des suspension et interruption du délai de prescription.
Rappelons en premier lieu que la suspension du délai arrête le cours de celui-ci, alors que l’interruption déclenche un nouveau délai de même durée que l’ancien à compter de la date de l’acte interruptif. (Articles 2230 et 2231 cciv)
En l’espèce, la saisine du juge en référé-expertise est un acte interruptif, qui fait donc courir un nouveau délai de même durée.
Le cours de ce nouveau délai est par contre suspendu par les mesures d’expertises. Cette suspension prend fin à la date de dépôt du rapport d’expertise.
Dans cette affaire, la date de début du nouveau délai accordé par l’acte interruptif est de suite suspendu par la mise en place des mesures d’expertise. Au dépôt du rapport, le délai reprend donc son cours pour un an.
La date de prescription aurait donc été acquise en l’espèce au 30 juin 2016 et l’affaire n’était donc pas prescrite.